Andrée Stekké, veuve de Jan Totté, est décédée le 10 novembre 2023. Andrée a beaucoup compté dans l’histoire de l’Iram, en particulier celle qui s’est déroulée au Niger dans les années 1960. Elle s'était notamment fortement investie dans le projet d’animation féminine, une expérience qui a marqué la construction de l'Iram. Nous reproduisons ici le texte lu par Etienne Beaudoux lors de ses funérailles, le 17 novembre dernier. Ce texte rassemble les témoignages et souvenirs de plusieurs membres de l'Iram qui l’ont bien connue.
Chère Andrée et chère famille et amis,
Oui je suis venu de Paris ce jour, « ceux qui m’aiment prendront le train » n’est-ce pas ?
Et, ils et elles sont nombreux, ceux et celles, qui ont de l’affection pour Andrée et Jan dans le réseau IRAM, et je vais essayer de prendre en compte cette reconnaissance et affection exprimées depuis l’annonce de la nouvelle, par Annette Corrèze, René Billaz, Jean François et Vicky Barrès, Madeleine Debourg, Pierre et Brigitte Biche, Dominique Gentil, André Marty, Jérôme Coste, Marie-Jo Doucet, François Doligez et tous les autres.
« Pour tous ceux et toutes celles qui ont aimé Andrée et Jan et qui ont partagé avec elle, avec eux, des moments de vie ! » Jan écrit à la façon bretonne. Ah ces « maudits » français !
L’histoire de l’IRAM est une collection de prénoms parmi lesquels ceux de Jan et Andrée figurent en belle place. Annette Corrèze parle à propos d’Andrée de « Quelqu’un de rare, qu’on n’oubliera pas ».
On le dit souvent mais là c’est vraiment vrai, vrai de vrai !
Les « Totté », comme on disait couramment, ont été des piliers de l’IRAM au Niger au moment de l’Indépendance. Jan a été chef de la mission d’animation rurale jusqu’en 1970. Et tous les anciens et anciennes soulignent l’accueil si chaleureux des « Totté » quand ils venaient à Niamey
(Petit souvenir, léger : « j’y ai découvert avec Andrée, raconte Dominique Gentil, des pâtes au sucre, une spécialité belge ! »)
Quant à Andrée, Annette Corrèze rappelle qu’à son arrivée au Niger : « Andrée, investie déjà dans le projet d’animation féminine est celle qui m’a fait connaître les femmes nigériennes qui ont été ensuite des actrices incomparables. Forte de son expérience au Congo elle nous a aidées dans notre réflexion, sans jamais s’imposer », dit-elle en évoquant le groupe de femmes dont Andrée qui ont travaillé sur le genre avant la promotion du concept.
« Pour l’IRAM, le Niger de 1961, au moment de l’indépendance fut une période féconde, le Président Amani Diori adhère… aux fondamentaux de l’IRAM : la participation populaire au développement. S’ensuivent d’innombrables sessions de formation pour favoriser l’émergence d’organisations paysannes locales : un travail extrêmement stimulant dans un contexte politique aussi favorable. Le coup d’Etat du colonel Kountché (1975) a certes porté un coup fatal aux ambitions nationales de l’Animation, mais pas à ses expressions spécifiques : la gestion des coopératives, la place des femmes dans la société » (René Billaz)
Jan et Andrée furent des acteurs de cette histoire. Et Marc leur fils rapporte que Diori disait à son père : « je sais que vous êtes en train de scier les pieds de mon trône, mais je sais que c’est bon, c’est ce qu’il faut faire ! » Légende ou vérité ? Cela exprime en tout cas bien le projet de l’animation rurale à l’époque.
Et les anciens du Niger de dire : « nous savons qu’Andrée emporte un peu de notre histoire avec elle et qu’elle nous lègue une part de la sienne… » (Brigitte et Pierre Biche).
Et je laisse René Billaz l’exprimer par ailleurs avec ses mots mais je note dans son témoignage : « Jan Totté, décédé au début des années 80, et Andrée, qui vient de nous quitter ce jour, étaient comme un frère et une sœur pour moi, et leurs quatre enfants comme des neveux ». (René Billaz)
Après le Niger, André Marty se souvient que Jan avait conseillé Euro Action Sahel pour le programme de relance coopérative. Et ensuite entre 1971 et 1975 Jan fut responsable pour l’IRAM en Algérie d’un projet de formation professionnelle avec Stan et Nicole Mackiewicz, Michel Robert, Serge Alécian.
« Et personnellement, je me souviens à l’occasion de missions à Médéa avant la période noire en Algérie, de mes venues à Hydra et du plaisir de rencontrer la famille dans cette grande villa d’Alger dans le sous-sol duquel planait l’histoire de l’IRAM ». Etienne Beaudoux
Mouchka, ainsi appelée par ses enfants, restera une belle figure dans l’histoire de l’IRAM
« J’ai eu la joie de participer à la deuxième fête de ses 90 ans, chez son fils Philippe près de Montpellier. Comme d’habitude une aura d’amour, d’amitié, de reconnaissance et d’intelligence l’entourait. Après des contacts téléphoniques, toujours des échanges, toujours sa lucidité sur les évènements du monde. Comment décrire Andrée : d’abord le sourire et l’empathie. L’engagement, la lucidité, le rayonnement. Quelqu’un de rare, qu’on n’oubliera pas... » (Annette Corrèze)
« Je profite de cette occasion pour saluer tous ses enfants que j’ai, sans doute, connus quand ils étaient tout petits. » (Dominique Gentil)
A ses enfants et petits-enfants nous disons notre honneur d’avoir connu cette grande dame et d’évoquer son souvenir.
Etienne Beaudoux